Au-delà des chiffres et des évaluations habituelles, des transactions surprennent le marché avec des prix de cession bien au-delà de ce que la ‘juste valeur’ d’une entreprise semble justifier. J’essaie dans cet article de répondre à cette question qu’on me pose parfois.
Dans notre métier de conseil en transmission d’entreprise, nous sommes régulièrement confrontés à la nécessité de définir un objectif de prix réaliste pour l’entreprise à céder.
Comprendre la Juste Valeur d’une entreprise
La valorisation n’est pas une science exacte. La définition même de l’objectif d’un avis de valeur illustre la complexité de la tâche : « déterminer le montant le plus probable qu’un acheteur volontaire et bien informé paiera, qu’un vendeur acceptera et, j’ajoute, qu’une banque financera, quand ni l’acquéreur ni le cédant ne sont soumis à une contrainte particulière ».
Pour finaliser ces avis de valeur, on utilise différentes méthodes qu’on choisit selon le contexte et le type d’opération : méthodes basées sur les actifs nets retraités, sur les prix d’opérations comparables, sur des multiples de l’EBE (ou de l’EBITDA), sur les flux de trésorerie… Le résultat de ces méthodes pourra être considéré comme la « juste valeur » de l’entreprise.
Au-delà de la Juste Valeur : la « Valeur Stratégique »
Il arrive que des opérations soient finalisées à un prix de cession significativement supérieur à cette « juste valeur ». On me demande souvent comment cela est possible.
Sans vouloir être simpliste, l’explication est facile : ces valorisations exceptionnelles découlent de l’intérêt stratégique d’acquéreurs spécifiques, prêts à investir au-delà de la juste valeur pour des avantages uniques qui s’ajoutent à la valeur intrinsèque de la cible : synergies, réductions de coûts, dépassement d’un seuil critique, accès rapide à un marché, intégration d’un savoir-faire unique… Au-delà de la « valeur normale », l’acquéreur paye la « VALEUR STRATÉGIQUE » de l’opération.
Ces avantages ne seront appréciés pleinement que par des acquéreurs stratégiques, qui grâce à la reprise pourront effectuer une opération d’intégration horizontale, verticale, une diversification stratégique, une croissance externe rapide …
Un repreneur individuel ne pourra généralement pas intégrer ces critères dans son évaluation du projet.
La plupart des petites entreprises, sauf exception, ne peuvent pas apporter ce genre d’avantages « stratégiques » à un repreneur ; par conséquent, leur prix de vente se rapprochera de la « valeur normale ».
L’art de la Valorisation
Une part importante de notre travail quand même, et ceci dans tous les projets de cession de PME que nous accompagnons, est celui d’identifier et de valoriser les points forts spécifiques de chaque entreprise. Cela nous permet de justifier rationnellement d’un prix objectif plus élevé, tout en restant réaliste. Un prix objectif trop élevé ralentira le processus de vente ou découragera les acheteurs potentiels ; un prix trop bas peut léser le vendeur.
En même temps, une autre tâche importante de notre accompagnement est d’identifier les acquéreurs potentiels qui reconnaîtront ces éléments justifiant le prix proposé.
L’art de la Négociation
Finalement, c’est toujours le marché qui fixera le prix. Entre l’évaluation théorique et le prix définitif, une phase de négociation délicate s’engage entre un repreneur, souvent désireux de payer le moins possible et un cédant qui souhaite dans la plupart des cas vendre le plus cher possible (même si certains cédants ont d’autres priorités que l’obtention du prix le plus élevé possible). Les aspects émotionnels et psychologiques jouent aussi un rôle non négligeable dans cette étape.
L’accompagnement par des experts capables de défendre le prix demandé de façon rationnelle, d’intégrer les problématiques de l’acquéreur, de naviguer habilement dans les négociations, s’avère donc indispensable. Finalement, la transaction idéale est celle qui satisfait à la fois le vendeur et l’acheteur, tout en respectant la réalité du marché.
Auteur: Carlo Paolucci (Président Transworld France)